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Information sur l'auteur

Emeline Pasquier est une observatrice de l'entreprise à la double expérience, le conseil en organisation et stratégie, et le management en communication et développement durable. Elle est membre du bureau de l'association Innovation Citoyenne et Développement Durable (ICDD).

La dématérialisation sociale défait l’entreprise

Cela fait bien longtemps que le virtuel a envahi nos vies. Que notre rapport au réel et au palpable a pris de la distance. Ce que j’échangeais hier de la main à la main, les yeux dans les yeux, s’est transformé d’un clic au clic, mon regard devant l’écran. C’est l’histoire du troc, devenu monnaie que l’on frappe et qui sonne, à ce pouvoir d’achat que j’utilise de plus en plus sans le toucher. Une évolution qui ne nous choque pas aujourd’hui, même si nombreux sont ceux qui reconnaissent bien volontiers que la perte du toucher a souvent fait perdre un peu aussi la valeur des choses. C’est ce que l’on retrouve parfois dans cette légère frustration qui accompagne le billet que l’on casse en petites pièces parce que l’on ne dispose plus d’assez de monnaie. A cet instant précis, une sorte de réminiscence de la valeur se rappelle à notre bon souvenir.

Quel rapport avec l’entreprise me direz-vous ?

Je regarde le monde du conseil, cet univers des prestations intellectuelles et je ne peux manquer d’y trouver un parallèle troublant. Ils sont consultants, ils travaillent en mission pour le compte de clients et leur rapport à l’entreprise est tout aussi sournois. Le lien physique, matérialisé par un poste de travail dédié, a pour partie disparu puisque l’entreprise n’est plus qu’un endroit de passage, un centre administratif qui compte des entrées et des sorties, un centre de paye, et surtout pas un centre de vie. Le lien social n’a plus de place, ni pour ces consultants, ni pour ceux qui œuvrent dans le centre administratif. Quel lien peut se construire sur la base d’un contrat, de quelques mails et d’un versement qui tombe chaque mois ?

Nos entreprises agricoles et nos entreprises industrielles savaient ce qu’elles produisaient et savaient unir celles et ceux qui y participaient, nos entreprises de conseil et de services ont tellement distendu le lien qui tenait leurs collaborateurs qu’il s’est brisé.  La perte d’échanges, de projets construits ensemble a créé de la distance. La distance créée par ce travail réalisé hors des murs de l’entreprise a créé l’absence et a fait naître ce que j’appelerai de la dématérialisation sociale. L’absence et la dématérialisation sociale ont fait perdre la vue à l’entreprise et sur ce qui fait l’entreprise. L’entreprise, comme lieu d’expression, de réalisation et de reconnaissance par les autres, par ses pairs.

Le manque de fidélisation et de sentiment d’appartenance, l’absence de sens et de valeurs partagées, le manque de solidarité sont des maux connus des entreprises de conseil et de services. Et pour cause, comment s’attacher et donner de la valeur à ce qui n’est plus que dématérialisé ?

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